Énoncé de position sur le language centré sur les personnes ayant un handicap
Position
Le Conseil de Santé publique Sudbury et districts valorise la diversité et la communication efficace.[i] Nous croyons qu’il est possible de réduire la stigmatisation des personnes ayant un handicap ainsi que les préjugés et la discrimination dont elles sont victimes en adoptant un langage respectueux. Ainsi, nous nous engageons à prendre les mesures suivantes :
- demander aux personnes ayant un handicap et à leurs représentants la désignation qu’ils souhaitent;
- adopter un langage axé d’abord sur la personne, et non sur son handicap, lorsqu’il est impossible d’obtenir des renseignements ou quand la réponse est mitigée;
- nous tenir au courant de l’évolution du langage concernant les handicaps.
Renseignements généraux
Bien des gens considèrent les handicaps comme une faiblesse, mais la définition de ceux-ci se fait de plus en plus de manière positive. Les handicaps peuvent aussi être perçus comme des variations naturelles des capacités humaines, une sorte de diversité dont nous pouvons tirer un sentiment de fierté.[ii]
Santé publique Sudbury et districts s’est donné pour mission d’améliorer la santé de nos populations du point de vue de l’équité en matière de santé en agissant sur les déterminants sociaux de la santé. Les personnes ayant un handicap ou une maladie mentale sont des exemples de groupes prioritaires pouvant courir un risque accru d’iniquités en matière de santé.[iii]
Saine équité
Selon la Commission des droits de la personne, un Ontarien sur sept est atteint d’un ou de plusieurs handicaps.[iv] Les personnes ayant un handicap forment un groupe prioritaire qui est moins susceptible que les autres d’adopter des comportements favorables à la santé comme l’activité physique et le renoncement au tabac, et de participer au dépistage concernant le cancer, la santé bucco-dentaire, le cholestérol, la pression sanguine, la vue et l’ouïe.[v] Les personnes ayant un handicap obtiennent également de moins bons résultats en ce qui touche l’hypertension, le diabète, la douleur chronique, l’obésité, les maladies du cœur, les blessures liées aux chutes, la dépression et le suicide comparativement aux autres adultes .[vi]
Historiquement, les personnes ayant un handicap ont été victimes d’abus, de négligence, d’exclusion, de marginalisation et de discrimination.[vii] Le taux d’emploi des Canadiens ayant un handicap est nettement inférieur à celui des autres citoyens.[viii] Parmi ceux qui occupaient un emploi, 27 % déclaraient que leur employeur étaient inconscient de leurs limites. Plus de la moitié (54 %) des Ontariens ayant une dépendance ou un problème de santé mentale ne font pas partie de la population active, comparativement à 43 % des personnes atteintes d’un autre handicap et à 21 % des personnes n’ayant aucun handicap.[ix]
Les personnes ayant un handicap font l’objet d’une exclusion injuste qui peut être évitée et qui est d’origine sociale, ce qui crée des iniquités en matière de santé.
Langage
Le langage que nous employons chaque jour façonne notre compréhension du monde qui nous entoure. Il influence les sentiments que les gens éprouvent à leur sujet et la manière dont les autres les perçoivent.[x] Utiliser certains mots, même sans malice, peut entraîner une stigmatisation et d’autres disparités en matière de santé. Nous exprimer autrement peut améliorer l’autonomie, le respect, la compréhension et l’empathie.
Depuis les mouvements pour les droits civiques qui se manifestaient dans les années 1970, nous avons changé notre manière de parler du genre (population canadienne plutôt que Canadiens), de l’âge (aînés plutôt que personnes âgées), de la race et de l’ethnicité, de la classe sociale (personnes vivant dans la pauvreté plutôt que pauvres) et de bien d’autres groupes sociaux. Le nouveau langage est créé par les personnes qui déclarent faire partie du groupe et des experts en la matière. De même, notre manière de parler des personnes ayant un handicap évolue énormément.
Langage axé d’abord sur la personne ou l’identité
Au Canada, les organismes se servent du langage axé d’abord sur la personne pour discuter des handicaps depuis les années 1980.[xi] Ce principe repose sur la prémisse selon laquelle le langage employé pour désigner les personnes ayant un handicap devrait être objectif et respectueux. Récemment, il y a eu un débat dans le milieu des personnes ayant un handicap sur la question de savoir s’il convient surtout d’employer un langage axé d’abord sur la personne ou sur l’identité. Dans le langage axé d’abord sur la personne, celle-ci passe avant le handicap. Par exemple, au lieu de dire les handicapés, on dirait les personnes ayant un handicap. Le langage axé d’abord sur l’identité fait passer l’identité en premier par des termes comme « handicapés » sans connotations négatives. Les critiques de ce langage estiment qu’il ne correspond pas à la notion de handicap comme étant un produit de la société et porte à croire que le handicap est une caractéristique médicale individuelle, et non un enjeu public.[xii]
Langage axé d’abord sur la personne
Dans le langage axé d’abord sur la personne, le handicap est considéré comme une étiquette, et non une caractéristique par laquelle la personne est définie.[xiii] Les personnes ayant un handicap sont d’abord et avant tout des personnes. La personne n’est pas un handicap, elle en est atteinte. Ce langage a pour but d’insister sur la valeur de la personne en la percevant comme telle, et non comme un état, et de promouvoir le respect et l’autonomie.
Langage axé d’abord sur l’identité
Selon les défenseurs du langage axé d’abord sur l’identité, faire passer la personne en premier s’impose uniquement si les handicaps sont perçus comme étant implicitement négatifs.[xiv] Le langage axé d’abord sur la personne n’élimine pas la stigmatisation due au handicap. Il détache ce dernier de la personne. Ce n’est également pas le langage que nous employons pour parler d’autres identités. Par exemple, nous disons d’une personne qu’elle est caucasienne ou de sexe masculin, et non qu’elle présente des traits de masculinité ou d’origine caucasienne. Certaines personnes ayant un handicap perçoivent leur handicap comme une partie essentielle de leur identité et de leur culture, en particulier celles qui sont sourdes ou autistes. Selon cette position, le langage axé d’abord sur la personne peut donner l’impression que la personne compte malgré son handicap. Le langage axé d’abord sur l’identité est une déclaration d’affirmation du handicap. Les handicaps deviennent des identités neutres ou positives, et non des limites, des contraintes ou des états établis par diagnostic.
Emploi approprié du langage
Le langage axé d’abord sur la personne constitue la manière généralement acceptée par laquelle les professionnels et les organismes s’adressent aux personnes ayant un handicap, leur écrivent ou en parlent.[xv] Autant que possible, demandez à la personne ou à celle qui représente son groupe comment elle souhaiterait se faire appeler et employez le langage demandé. Sinon, optez pour le langage axé d’abord sur la personne.
Tableau 1 : directives sur la manière de parler des handicaps et d’écrire à leur sujet
Directive | Raisonnement | Exemples : Dites ceci | Exemples : Et non ceci |
---|---|---|---|
Employez le langage axé d’abord sur la personne si vous ne pouvez demander à la personne ou au groupe la désignation souhaitée. | Afin de mettre l’accent sur la personne, et non sur le handicap | Personnes ayant un handicap Personne atteinte de paraplégie Personne avec un handicap visuel ou avec vision affaiblie | Les handicapés Les paraplégiques Les aveugles ou les malvoyants |
Employez le langage actif. | Afin de mettre l’accent sur l’autonomie et la capacité, et non sur la dépendance et le handicap | Personne en fauteuil roulant | Personne clouée ou confinée à un fauteuil roulant |
Évitez les expressions courantes risquant de stigmatiser les personnes ayant un handicap. | Certaines expressions courantes reposent sur un langage discriminatoire et peuvent marginaliser involontairement les personnes ayant un handicap. | C’est scandaleux, ridicule ou injuste Stationnement ou toilettes accessibles aux personnes ayant un handicap | C’est fou, insensé ou boiteux Stationnement ou toilettes pour handicapés |
Évitez de confondre absence de handicap et normalité. | Dire qu’un groupe est « normal » signifie que tous ceux qui n’en font pas partie sont « anormaux ». | Personnes n’ayant aucun handicap | Personnes normales, saines ou valides |
Évitez les remarques condescendantes. | Les personnes ayant un handicap sont comme n’importe qui d’autre; complimentez-les uniquement de la manière qui conviendrait pour des adultes n’ayant aucun handicap. | Félicitations ou beau travail | Vous êtes tellement inspirant ou courageux. |
Employez un langage équilibré. | Le langage à connotations négatives met l’accent sur la passivité et stigmatise les personnes ayant un handicap. | Ayant reçu un diagnostic de [maladie] Personne vivant avec le sida | Souffre de [maladie] ou est victime de [maladie] Victime du sida |
Si vous commettez une erreur, présentez des excuses et poursuivez. | Nous commettons tous des erreurs. Cela fait partie de l’apprentissage. Si vous en commettez une et qu’une personne ayant un handicap corrige votre langage (même si elle préfère d’autres termes que ceux suggérés ici), présentez des excuses brièvement, mais sincèrement, et tâchez d’employer le langage privilégié. N’y pensez plus, car vous risquez de rendre la personne mal à l’aise. |
Images
Il importe d’inclure des images de personnes ayant un handicap visible afin de normaliser leur présence quotidienne, même si le sujet ne touche aucun handicap. Ces images devraient décrire les personnes ayant un handicap comme des personnes participant activement à la vie sociale. Il y a lieu de les présenter dans divers cadres d’activité, de carrière ou de comportement sans insister sur le handicap.
Par exemple, les images qui suivent sont des symboles pour les commodités accessibles dans un environnement bâti, comme les toilettes et les sièges adaptés ou les rampes d’accès.[xvi] Dans l’image de gauche, couramment utilisée, la personne est assise dans un fauteuil comme si elle attendait de se faire pousser. Dans l’autre, il est clair qu’elle se déplace activement. Ces petits changements peuvent avoir un effet durable sur les attitudes, les valeurs et les croyances concernant le handicap.
Conclusion
Le langage que nous employons pour parler des personnes ayant un handicap a changé depuis quelques décennies et la tendance se maintiendra probablement. Les personnes ayant un handicap ne forment pas un groupe homogène, et le langage qu’elles emploient pourra changer dans certains cas, mais pas dans d’autres. Par exemple, les personnes atteintes d’autisme ou sourdes sont bien plus susceptibles d’employer le langage axé d’abord sur l’identité que les autres personnes atteintes d’un trouble cognitif (bien que les fournisseurs de services et les parents d’enfants atteints d’autisme tendent à employer le langage axé d’abord sur la personne).
Santé publique Sudbury et districts reconnaît l’importance d’adopter des pratiques de communication adaptées et respectueuses. L’engagement continu auprès des groupes et des associations de personnes ayant un handicap permettra de s’assurer que les programmes et les services sont pleinement accessibles et inclusifs.
[i] Service de santé publique de Sudbury et du district, (n. d.). Plan stratégique 2013-2017. Service de santé publique de Sudbury et du district
[ii] Dunn DS et Hammer ED. (2014). On teaching multicultural psychology. APA Handbook of multicultural psychology, Theory and Research, (p.43-58). Washington DC : APA
[iii] Service de santé publique de Sudbury et du district, 2009. Priority Populations Primer: A few things you should know about social inequities in health in SDHU communities
[iv] Commission ontarienne des droits de la personne (2016). En quelques chiffres : Profil statistique des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale et des dépendances en Ontario
[v] AUCD. (2016). Including People with Disabilities: Public Health Workforce Competencies. Association of University Centers on Disabilities (AUCD), National Center for Birth Defects and Developmental Disabilities (NCBDDD), Office of the Director, Centers for Disease Control and Prevention (ODCDC), and the Office for State, Tribal, Local, and Territorial Support (OT); Havercamp SM. et Scott, HM. (2015). National health surveillance of adults with disabilities, adults with intellectual and developmental disabilities, and adults with no disabilities. Disability and Health Journal, 8(1), 165-172
[vi] AUCD, 2016; Lunksy Y, Klein-Geltink JE et Yates, EA. (2013). Atlas on the Primary Care of Adults with Developmental Disabilities in Ontario. Institute for Clinical Evaluative Sciences et Centre de toxicomanie et de santé mentale, Toronto ON
[vii] Commission ontarienne des droits de la personne, 2016
[viii] Arim, R (2015). Enquête canadienne sur l’incapacité de Statistique Canada, 2012. Repérée le 15 mars 2017 à l’adresse : http://www.statcan.gc.ca/pub/89-654-x/89-654-x2013002-fra.pdf
[ix] Commission ontarienne des droits de la personne, 2016
[x] Titchkosky T (2001). Disability: A Rose by Any Other Name? “People-First” Language in Canadian Society, CRSA/RCSA, 38(2): pp 125-140
[xi] Titchkosky, 2001
[xii] ibid
[xiii] Dunn, DS et Andrews EE. (2015). Person-First and Identity-First Language: Developing psychologists’ cultural competence using disability language. American Psychologist, 70(3) : pp. 255-264.
[xiv] ibid
[xv] Reportez-vous à American Psychological Association (http://www.apa.org/pi/disability/resources/choosing-words.aspx), The Americans with Disabilities Act National Network (https://adata.org/factsheet/ADANN-writing), The Canadian Journalism Project (http://www.j-source.ca/article/five-things-journalists-should-keep-mind-when-writing-about-autism).
[xvi] The Accessible Icon Project. 2017. Redesigned Accessibility Symbol Coming to New York, Image from HandiLift. http://www.handi-lift.com/articles/redesigned-accessibility-symbol-coming-to-new-york/
Dernière modification : 26 mai 2021